I. 270
qui s'étendait derrière le village sur plusieurs kilomètres. Le bruit
des vagues et du vent se mêlaient dans mon esprit, et je progressais
lentement au bord de l'eau. C'était une plage immense, abandonnée et
déserte, que balayaient continûement des vents tourbillonants. Je
m'arrêtais parfois, je m'asseyais dans le sable, et, tandis que tout
autour de moi des filaments d'algues sèches s'envolaient vers les dunes,
je ramassais distraitement un ou deux cailloux, que je lançais pares-
seusement dans la mer. Mon fils me regardait faire, un biscuit à la main,
solidement maintenu dans sa poussette par une petite ceinture. Parfois,
il se penchait en avant pour essayer de s'emparer de quelque objet échoué
sur la plage, et je lui tendais à mesure tout ce qu'il convoitait, des
morceaux de bois morts rejetés par la marée qui avaient pris des formes
de talismans bizarres, des galets, des brindilles (une vieille sandale en
plastique aussi, à laquelle il semblait tenir tout particulièrement).
Souvent, le matin très tôt, tandis que mon fils dormait tranquillement
dans le lit de voyage que j'avais installé près de moi dans la chambre
d'hôtel, un petit lit pliant assez pratique qui consistait en un assemblage
de tubes métalliques jaunes et creux qui s'emboîtaient les uns dans les
autres pour composer un châssis rectangulaire, sorte de petit centre Pom-
pidou qui reposait là dans la pénombre de la chambre à côté de mes sacs et
de mes valises, je me levais sans bruit et je quittais l'hôtel pour me
promener dans le village. Il faisait à peine jour dehors, et l'atmosphère
était tout emplie d'une fin de nuit bleutée, avec une lune d'aube très blanche
dans le ciel, qui s'inscrivait au-dessus des lignes régulières que traçaient
les fils des poteaux télégraphiques. Je me rendais dans le port et longeais
la petite jetée de pierre silencieuse et déserte, où quelques barques
ancrées dans l'obscurité tanguaient imperceptiblement le long de leurs
amarres dans un bruit régulier de clapotement d'eau et de grincement de
filins.
C'est trois ou quatre jours après mon arrivée que j'avais découvert là
le chat mort. De loin, j'avais d'abord pris la forme noire qui flottait
entre les barques pour quelque sac en plastique, une vieille couverture
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qui s'étendait derrière le village sur plusieurs kilomètres. Le bruit
des vagues et du vent se mêlaient dans mon esprit, et je progressais
lentement au bord de l'eau. C'était une plage immense, abandonnée et
déserte, que balayaient continûement des vents tourbillonants. Je
m'arrêtais parfois, je m'asseyais dans le sable, et, tandis que tout
autour de moi des filaments d'algues sèches s'envolaient vers les dunes,
je ramassais distraitement un ou deux cailloux, que je lançais pares-
seusement dans la mer. Mon fils me regardait faire, un biscuit à la main,
solidement maintenu dans sa poussette par une petite ceinture. Parfois,
il se penchait en avant pour essayer de s'emparer de quelque objet échoué
sur la plage, et je lui tendais à mesure tout ce qu'il convoitait, des
morceaux de bois morts rejetés par la marée qui avaient pris des formes
de talismans bizarres, des galets, des brindilles (une vieille sandale en
plastique aussi, à laquelle il semblait tenir tout particulièrement).
Souvent, le matin très tôt, tandis que mon fils dormait tranquillement
dans le lit de voyage que j'avais installé près de moi dans la chambre
d'hôtel, un petit lit pliant assez pratique qui consistait en un assemblage
de tubes métalliques jaunes et creux qui s'emboîtaient les uns dans les
autres pour composer un châssis rectangulaire, sorte de petit centre Pom-
pidou qui reposait là dans la pénombre de la chambre à côté de mes sacs et
de mes valises, je me levais sans bruit et je quittais l'hôtel pour me
promener dans le village. Il faisait à peine jour dehors, et l'atmosphère
était tout emplie d'une fin de nuit bleutée, avec une lune d'aube très blanche
dans le ciel, qui s'inscrivait au-dessus des lignes régulières que traçaient
les fils des poteaux télégraphiques. Je me rendais dans le port et longeais
la petite jetée de pierre silencieuse et déserte, où quelques barques
ancrées dans l'obscurité tanguaient imperceptiblement le long de leurs
amarres dans un bruit régulier de clapotement d'eau et de grincement de
filins.
C'est trois ou quatre jours après mon arrivée que j'avais découvert là
le chat mort. De loin, j'avais d'abord pris la forme noire qui flottait
entre les barques pour quelque sac en plastique, une vieille couverture
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qui s'étendait derrière le village sur plusieurs kilomètres. Le bruit
des vagues et du vent se mêlaient dans mon esprit, et je progressais
lentement au bord de l'eau. C'était une plage immense, abandonnée et
déserte, que balayaient continûement des vents tourbillonants. Je
m'arrêtais parfois, je m'asseyais dans le sable, et, tandis que tout
autour de moi des filaments d'algues sèches s'envolaient vers les dunes,
je ramassais distraitement un ou deux cailloux, que je lançais pares-
seusement dans la mer. Mon fils me regardait faire, un biscuit à la main,
solidement maintenu dans sa poussette par une petite ceinture. Parfois,
il se penchait en avant pour essayer de s'emparer de quelque objet échoué
sur la plage, et je lui tendais à mesure tout ce qu'il convoitait, des
morceaux de bois morts rejetés par la marée qui avaient pris des formes
de talismans bizarres, des galets, des brindilles (une vieille sandale en
plastique aussi, à laquelle il semblait tenir tout particulièrement).
Souvent, le matin très tôt, tandis que mon fils dormait tranquillement
dans le lit de voyage que j'avais installé près de moi dans la chambre
d'hôtel, un petit lit pliant assez pratique qui consistait en un assemblage
de tubes métalliques jaunes et creux qui s'emboîtaient les uns dans les
autres pour composer un châssis rectangulaire, sorte de petit centre Pom-
pidou qui reposait là dans la pénombre de la chambre à côté de mes sacs et
de mes valises, je me levais sans bruit et je quittais l'hôtel pour me
promener dans le village. Il faisait à peine jour dehors, et l'atmosphère
était tout emplie d'une fin de nuit bleutée, avec une lune d'aube très blanche
dans le ciel, qui s'inscrivait au-dessus des lignes régulières que traçaient
les fils des poteaux télégraphiques. Je me rendais dans le port et longeais
la petite jetée de pierre silencieuse et déserte, où quelques barques
ancrées dans l'obscurité tanguaient imperceptiblement le long de leurs
amarres dans un bruit régulier de clapotement d'eau et de grincement de
filins.
C'est trois ou quatre jours après mon arrivée que j'avais découvert là
le chat mort. De loin, j'avais d'abord pris la forme noire qui flottait
entre les barques pour quelque sac en plastique, une vieille couverture
I. 270
qui s'étendait derrière le village sur plusieurs kilomètres. Le bruit
des vagues et du vent se mêlaient dans mon esprit, et je progressais
lentement au bord de l'eau. C'était une plage immense, abandonnée et
déserte, que balayaient continûement des vents tourbillonants. Je
m'arrêtais parfois, je m'asseyais dans le sable, et, tandis que tout
autour de moi des filaments d'algues sèches s'envolaient vers les dunes,
je ramassais distraitement un ou deux cailloux, que je lançais pares-
seusement dans la mer. Mon fils me regardait faire, un biscuit à la main,
solidement maintenu dans sa poussette par une petite ceinture. Parfois,
il se penchait en avant pour essayer de s'emparer de quelque objet échoué
sur la plage, et je lui tendais à mesure tout ce qu'il convoitait, des
morceaux de bois morts rejetés par la marée qui avaient pris des formes
de talismans bizarres, des galets, des brindilles (une vieille sandale en
plastique aussi, à laquelle il semblait tenir tout particulièrement).
Souvent, le matin très tôt, tandis que mon fils dormait tranquillement
dans le lit de voyage que j'avais installé près de moi dans la chambre
d'hôtel, un petit lit pliant assez pratique qui consistait en un assemblage
de tubes métalliques jaunes et creux qui s'emboîtaient les uns dans les
autres pour composer un châssis rectangulaire, sorte de petit centre Pom-
pidou qui reposait là dans la pénombre de la chambre à côté de mes sacs et
de mes valises, je me levais sans bruit et je quittais l'hôtel pour me
promener dans le village. Il faisait à peine jour dehors, et l'atmosphère
était tout emplie d'une fin de nuit bleutée, avec une lune d'aube très blanche
dans le ciel, qui s'inscrivait au-dessus des lignes régulières que traçaient
les fils des poteaux télégraphiques. Je me rendais dans le port et longeais
la petite jetée de pierre silencieuse et déserte, où quelques barques
ancrées dans l'obscurité tanguaient imperceptiblement le long de leurs
amarres dans un bruit régulier de clapotement d'eau et de grincement de
filins.
C'est trois ou quatre jours après mon arrivée que j'avais découvert là
le chat mort. De loin, j'avais d'abord pris la forme noire qui flottait
entre les barques pour quelque sac en plastique, une vieille couverture