I. 381
sur la plage, et je lui tendais à mesure tout ce qu'il convoitait, des
morceaux de bois morts rejetés par la marée qui avaient pris des formes
de talismans bizarres, des galets, des brindilles, une vieille sandale en
plastique aussi, bien grosse et transparente, dont il embrassa fougueusement
la semelle pleine de sable en poussant des petits tayauts d'allégresse.
De retour dans la chambre d'hôtel, je passais des heures allongé sur
le lit à barreaux qui occupait le centre de la pièce. Je ne faisais rien,
je n'attendais rien de particulier. Les murs, autour de moi, étaient humides
et sales, tapissés d'un vieux tissu orange assorti aux fleurs sombres
du couvre-lit et des rideaux. J'avais installé le lit de voyage de mon fils
près de moi dans la chambre, un petit lit pliant assez pratique qui consistait
en un assemblage de tubes métalliques jaunes et creux qui s'emboîtaient
les uns dans les autres pour composer un châssis rectangulaire, sorte de
petit centre Pompidou qui se dressait là dans la pénombre à côté de mes
sacs et de mes valises. Parfois, pendant que mon fils dormait tranquillement,
un petit bras replié en bouclier sur la poitrine et sa vieille sandale en
plastique trouvée sur la plage précieusement posée à côté de lui au fond
du lit, je me levais et faisais quelques pas en chaussettes dans la chambre.
J'allais jusqu'à la fenêtre et, soulevant le rideau, je regardais la route,
une parcelle de route déserte qui bordait un enclos livré aux mauvaises
herbes, où, au loin, à côté d'un figuier désséché qui ployait sous les poids
de ses branches mortes, un âne solitaire broutait du fenouil entre divers
détritus, des vieilles planches, des pneus abandonnés, une barque retournée
qui pourrissait sur place.
J'étais venu à Sasuelo pour voir les Biaggi, qui s'étaient retirés dans
le village quelques années plus tôt, mais, jusqu'à présent, poussé par une
sorte de paresse mêlée d'appréhension, j'avais toujours retardé le moement
de leur rendre visite, évitant même les parages de leur maison quand je
me promenais dans le village. Le jour de mon arrivée déjà, alors que je
pensais passer chez eux sitôt installé à l'hôtel, j'avais sans cesse dif-
féré le moment d'aller les trouver, et j'étais resté tout l'après-midi dans ma
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sur la plage, et je lui tendais à mesure tout ce qu'il convoitait, des
morceaux de bois morts rejetés par la marée qui avaient pris des formes
de talismans bizarres, des galets, des brindilles, une vieille sandale en
plastique aussi, bien grosse et transparente, dont il embrassa fougueusement
la semelle pleine de sable en poussant des petits tayauts d'allégresse.
De retour dans la chambre d'hôtel, je passais des heures allongé sur
le lit à barreaux qui occupait le centre de la pièce. Je ne faisais rien,
je n'attendais rien de particulier. Les murs, autour de moi, étaient humides
et sales, tapissés d'un vieux tissu orange assorti aux fleurs sombres
du couvre-lit et des rideaux. J'avais installé le lit de voyage de mon fils
près de moi dans la chambre, un petit lit pliant assez pratique qui consistait
en un assemblage de tubes métalliques jaunes et creux qui s'emboîtaient
les uns dans les autres pour composer un châssis rectangulaire, sorte de
petit centre Pompidou qui se dressait là dans la pénombre à côté de mes
sacs et de mes valises. Parfois, pendant que mon fils dormait tranquillement,
un petit bras replié en bouclier sur la poitrine et sa vieille sandale en
plastique trouvée sur la plage précieusement posée à côté de lui au fond
du lit, je me levais et faisais quelques pas en chaussettes dans la chambre.
J'allais jusqu'à la fenêtre et, soulevant le rideau, je regardais la route,
une parcelle de route déserte qui bordait un enclos livré aux mauvaises
herbes, où, au loin, à côté d'un figuier désséché qui ployait sous les poids
de ses branches mortes, un âne solitaire broutait du fenouil entre divers
détritus, des vieilles planches, des pneus abandonnés, une barque retournée
qui pourrissait sur place.
J'étais venu à Sasuelo pour voir les Biaggi qui s'étaient retirés dans
le village quelques années plus tôt, mais, jusqu'à présent, poussé par une
sorte de paresse mêlée d'appréhension, j'avais toujours retardé le moement
de leur rendre visite, évitant même les parages de leur maison quand je
me promenais dans le village. Le jour de mon arrivée déjà, alors que je
pensais passer chez eux sitôt installé à l'hôtel, j'avais sans cesse dif-
féré le moment d'aller les trouver, et j'étais resté tout l'après-midi dans ma
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sur la plage, et je lui tendais à mesure tout ce qu'il convoitait, des
morceaux de bois morts rejetés par la marée qui avaient pris des formes
de talismans bizarres, des galets, des brindilles, une vieille sandale en
plastique aussi, bien grosse et transparente, dont il embrassa fougueusement
la semelle pleine de sable en poussant des petits tayauts d'allégresse.
De retour dans la chambre d'hôtel, je passais des heures allongé sur
le lit à barreaux qui occupait le centre de la pièce. Je ne faisais rien,
je n'attendais rien de particulier. Les murs, autour de moi, étaient humides
et sales, tapissés d'un vieux tissu orange assorti aux fleurs sombres
du couvre-lit et des rideaux. J'avais installé le lit de voyage de mon fils
près de moi dans la chambre, un petit lit pliant assez pratique qui consistait
en un assemblage de tubes métalliques jaunes et creux qui s'emboîtaient
les uns dans les autres pour composer un châssis rectangulaire, sorte de
petit centre Pompidou qui se dressait là dans la pénombre à côté de mes
sacs et de mes valises. Parfois, pendant que mon fils dormait tranquillement,
un petit bras replié en bouclier sur la poitrine et sa vieille sandale en
plastique trouvée sur la plage précieusement posée à côté de lui au fond
du lit, je me levais et faisais quelques pas en chaussettes dans la chambre.
J'allais jusqu'à la fenêtre et, soulevant le rideau, je regardais la route,
une parcelle de route déserte qui bordait un enclos livré aux mauvaises
herbes, où, au loin, à côté d'un figuier désséché qui ployait sous les poids
de ses branches mortes, un âne solitaire broutait du fenouil entre divers
détritus, des vieilles planches, des pneus abandonnés, une barque retournée
qui pourrissait sur place.
J'étais venu à Sasuelo pour voir les Biaggi, qui s'étaient retirés dans
le village quelques années plus tôt, mais, jusqu'à présent, poussé par une
sorte de paresse mêlée d'appréhension, j'avais toujours retardé le moement
de leur rendre visite, évitant même les parages de leur maison quand je
me promenais dans le village. Le jour de mon arrivée déjà, alors que je
pensais passer chez eux sitôt installé à l'hôtel, j'avais sans cesse dif-
féré le moment d'aller les trouver, et j'étais resté tout l'après-midi dans ma
I. 381
sur la plage, et je lui tendais à mesure tout ce qu'il convoitait, des
morceaux de bois morts rejetés par la marée qui avaient pris des formes
de talismans bizarres, des galets, des brindilles, une vieille sandale en
plastique aussi, bien grosse et transparente, dont il embrassa fougueusement
la semelle pleine de sable en poussant des petits tayauts d'allégresse.
De retour dans la chambre d'hôtel, je passais des heures allongé sur
le lit à barreaux qui occupait le centre de la pièce. Je ne faisais rien,
je n'attendais rien de particulier. Les murs, autour de moi, étaient humides
et sales, tapissés d'un vieux tissu orange assorti aux fleurs sombres
du couvre-lit et des rideaux. J'avais installé le lit de voyage de mon fils
près de moi dans la chambre, un petit lit pliant assez pratique qui consistait
en un assemblage de tubes métalliques jaunes et creux qui s'emboîtaient
les uns dans les autres pour composer un châssis rectangulaire, sorte de
petit centre Pompidou qui se dressait là dans la pénombre à côté de mes
sacs et de mes valises. Parfois, pendant que mon fils dormait tranquillement,
un petit bras replié en bouclier sur la poitrine et sa vieille sandale en
plastique trouvée sur la plage précieusement posée à côté de lui au fond
du lit, je me levais et faisais quelques pas en chaussettes dans la chambre.
J'allais jusqu'à la fenêtre et, soulevant le rideau, je regardais la route,
une parcelle de route déserte qui bordait un enclos livré aux mauvaises
herbes, où, au loin, à côté d'un figuier désséché qui ployait sous les poids
de ses branches mortes, un âne solitaire broutait du fenouil entre divers
détritus, des vieilles planches, des pneus abandonnés, une barque retournée
qui pourrissait sur place.
J'étais venu à Sasuelo pour voir les Biaggi qui s'étaient retirés dans
le village quelques années plus tôt, mais, jusqu'à présent, poussé par une
sorte de paresse mêlée d'appréhension, j'avais toujours retardé le moement
de leur rendre visite, évitant même les parages de leur maison quand je
me promenais dans le village. Le jour de mon arrivée déjà, alors que je
pensais passer chez eux sitôt installé à l'hôtel, j'avais sans cesse dif-
féré le moment d'aller les trouver, et j'étais resté tout l'après-midi dans ma