I. 399
aperçue la veille dans le jardin des Biaggi et je m'approchai de la voiture
pour examiner un instant l'intérieur. Les sièges étaient très abîmés, défoncés
pratiquement, le cuir complètement élimé par endroits, et une entaille d'une
dizaine de centimètres qui laissait émerger une sorte de mousse synthétique
jaunâtre crevait en son centre le revêtement du siège du conducteur. Sur
la banquette arrière, une vete froissée reposait parmi un désordre de
vieux journaux et de matériel de pêche, de cannes et de palangrottes, de
plombs, de sachets d'hameçons et de bouteilles en plastique. Il avait plu
cette nuit et, tout près de là, sur le sol de la place, je remarquai une
grande flaque d'eau immobile dans la pénombre, qui reflétait faiblement
les arbres et les toits des maisons avoisinantes. Un léger souffle de vent
la faisait parfois frissonner et la surface de l'eau était alors parcourue
par une onde de frémissements qui brouillait un instant les reflets. Puis,
lentement, les reflets se recomposaient à la surface, et je me rendis compte
qu'au centre de la flaque, à côté d'une feuille morte recroquevillée dans
l'eau, miroitait le profil argenté de la vieille Mercedes grise. Autour du
reflet de la voiture, cependant, par je ne sais quel jeu de perspectives
et d'angle mort, il n'y avait aucune trace de ma présence.
Les eaux du port étaient lisses et paisibles, qui ondulaient faiblement
dans l'obscurité. Quelques barques, devant moi, tanguaient imperceptiblement
le long de leurs amarres dans un bruit régulier de clapotement très doux
et de grincement de cordes. Je m'étais assis sur la jetée à côté d'un amas
de filets de pêche dont le réseau serré de mailles recelait encore d'infimes
fragments de poissons décomposés, et je demeurais là dans la pénombre à
regarder le jour se lever sur la baie de Sasuelo. La mer était très sombre
encore, qui frémissait à peine à l'horizon, et, peu à peu, à mesure que le
soleil s'élevait de l'autre côté de la montagne, éclairant déjà le versant
opposé où se devinait un halo de clarté isolée et lointaine, les barques
du port qui se balançaient doucement sous mes yeux commençaient à prendre
des teintes rousses et orangées, tandis que les contours des quais, tout
autour, des filets de pêche et des rochers, des arbres et des fleurs, deve-
naient progressivement plus fermes et plus précis et finissaient lentement
de se défaire de l'empreinte bleutée de la nuit.
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aperçue la veille dans le jardin des Biaggi et je m'approchai de la voiture
pour examiner un instant l'intérieur. Les sièges étaient très abîmés, défoncés
pratiquement, le cuir complètement élimé par endroits, et une entaille d'une
dizaine de centimètres qui laissait émerger une sorte de mousse synthétique
jaunâtre crevait en son centre le revêtement du siège du conducteur. Sur
la banquette arrière, une vete froissée reposait parmi un désordre de
vieux journaux et de matériel de pêche, de cannes et de palangrottes, de
plombs, de sachets d'hameçons et de bouteilles en plastique. Il avait plu
cette nuit et, tout près de là, sur le sol de la place, je remarquai une
grande flaque d'eau immobile dans la pénombre, qui reflétait faiblement
les arbres et les toits des maisons avoisinantes. Un léger souffle de vent
la faisait parfois frissonner et la surface de l'eau était alors parcourue
par une onde de frémissements qui brouillait un instant les reflets. Puis,
lentement, les reflets se recomposaient à la surface et je me rendis compte
qu'au centre de la flaque, à côté d'une feuille morte recroquevillée dans
l'eau, miroitait le profil argenté de la vieille Mercedes grise. Autour du
reflet de la voiture, cependant, par je ne sais quel jeu de perspectives
et d'angle mort, il n'y avait aucune trace de ma présence.
Les eaux du port étaient lisses et paisibles, qui ondulaient faiblement
dans l'obscurité. Quelques barques, devant moi, tanguaient imperceptiblement
le long de leurs amarres dans un bruit régulier de clapotement très doux
et de grincement de cordes. Je m'étais assis sur la jetée à côté d'un amas
de filets de pêche dont le réseau serré de mailles recelait encore d'infimes
fragments de poissons décomposés, et je demeurais là dans la pénombre à
regarder le jour se lever sur la baie de Sasuelo. La mer était très sombre
encore, qui frémissait à peine à l'horizon, et, peu à peu, à mesure que le
soleil s'élevait de l'autre côté de la montagne, éclairant déjà le versant
opposé où se devinait un halo de clarté isolée et lointaine, les barques
du port qui se balançaient doucement sous mes yeux commençaient à prendre
des teintes rousses et orangées, tandis que les contours des quais, tout
autour, des filets de pêche et des rochers, des arbres et des fleurs, deve-
naient progressivement plus fermes et plus précis et finissaient lentement
de se défaire de l'empreinte bleutée de la nuit.
I. 399
aperçue la veille dans le jardin des Biaggi et je m'approchai de la voiture
pour examiner un instant l'intérieur. Les sièges étaient très abîmés, défoncés
pratiquement, le cuir complètement élimé par endroits, et une entaille d'une
dizaine de centimètres qui laissait émerger une sorte de mousse synthétique
jaunâtre crevait en son centre le revêtement du siège du conducteur. Sur
la banquette arrière, une vete froissée reposait parmi un désordre de
vieux journaux et de matériel de pêche, de cannes et de palangrottes, de
plombs, de sachets d'hameçons et de bouteilles en plastique. Il avait plu
cette nuit et, tout près de là, sur le sol de la place, je remarquai une
grande flaque d'eau immobile dans la pénombre, qui reflétait faiblement
les arbres et les toits des maisons avoisinantes. Un léger souffle de vent
la faisait parfois frissonner et la surface de l'eau était alors parcourue
par une onde de frémissements qui brouillait un instant les reflets. Puis,
lentement, les reflets se recomposaient à la surface, et je me rendis compte
qu'au centre de la flaque, à côté d'une feuille morte recroquevillée dans
l'eau, miroitait le profil argenté de la vieille Mercedes grise. Autour du
reflet de la voiture, cependant, par je ne sais quel jeu de perspectives
et d'angle mort, il n'y avait aucune trace de ma présence.
Les eaux du port étaient lisses et paisibles, qui ondulaient faiblement
dans l'obscurité. Quelques barques, devant moi, tanguaient imperceptiblement
le long de leurs amarres dans un bruit régulier de clapotement très doux
et de grincement de cordes. Je m'étais assis sur la jetée à côté d'un amas
de filets de pêche dont le réseau serré de mailles recelait encore d'infimes
fragments de poissons décomposés, et je demeurais là dans la pénombre à
regarder le jour se lever sur la baie de Sasuelo. La mer était très sombre
encore, qui frémissait à peine à l'horizon, et, peu à peu, à mesure que le
soleil s'élevait de l'autre côté de la montagne, éclairant déjà le versant
opposé où se devinait un halo de clarté isolée et lointaine, les barques
du port qui se balançaient doucement sous mes yeux commençaient à prendre
des teintes rousses et orangées, tandis que les contours des quais, tout
autour, des filets de pêche et des rochers, des arbres et des fleurs, deve-
naient progressivement plus fermes et plus précis et finissaient lentement
de se défaire de l'empreinte bleutée de la nuit.
I. 399
aperçue la veille dans le jardin des Biaggi et je m'approchai de la voiture
pour examiner un instant l'intérieur. Les sièges étaient très abîmés, défoncés
pratiquement, le cuir complètement élimé par endroits, et une entaille d'une
dizaine de centimètres qui laissait émerger une sorte de mousse synthétique
jaunâtre crevait en son centre le revêtement du siège du conducteur. Sur
la banquette arrière, une vete froissée reposait parmi un désordre de
vieux journaux et de matériel de pêche, de cannes et de palangrottes, de
plombs, de sachets d'hameçons et de bouteilles en plastique. Il avait plu
cette nuit et, tout près de là, sur le sol de la place, je remarquai une
grande flaque d'eau immobile dans la pénombre, qui reflétait faiblement
les arbres et les toits des maisons avoisinantes. Un léger souffle de vent
la faisait parfois frissonner et la surface de l'eau était alors parcourue
par une onde de frémissements qui brouillait un instant les reflets. Puis,
lentement, les reflets se recomposaient à la surface et je me rendis compte
qu'au centre de la flaque, à côté d'une feuille morte recroquevillée dans
l'eau, miroitait le profil argenté de la vieille Mercedes grise. Autour du
reflet de la voiture, cependant, par je ne sais quel jeu de perspectives
et d'angle mort, il n'y avait aucune trace de ma présence.
Les eaux du port étaient lisses et paisibles, qui ondulaient faiblement
dans l'obscurité. Quelques barques, devant moi, tanguaient imperceptiblement
le long de leurs amarres dans un bruit régulier de clapotement très doux
et de grincement de cordes. Je m'étais assis sur la jetée à côté d'un amas
de filets de pêche dont le réseau serré de mailles recelait encore d'infimes
fragments de poissons décomposés, et je demeurais là dans la pénombre à
regarder le jour se lever sur la baie de Sasuelo. La mer était très sombre
encore, qui frémissait à peine à l'horizon, et, peu à peu, à mesure que le
soleil s'élevait de l'autre côté de la montagne, éclairant déjà le versant
opposé où se devinait un halo de clarté isolée et lointaine, les barques
du port qui se balançaient doucement sous mes yeux commençaient à prendre
des teintes rousses et orangées, tandis que les contours des quais, tout
autour, des filets de pêche et des rochers, des arbres et des fleurs, deve-
naient progressivement plus fermes et plus précis et finissaient lentement
de se défaire de l'empreinte bleutée de la nuit.